Inhumation de Jacques TIWA: les "Ex-Parlementaires" saluent un grand Combattant de la Liberté!
Eloge funèbre de Jacques Tiwa
Martyr, Patriote Camerounais et
Panafricaniste
Camarade et Combattant Tiwa!
Parents et Amis ici présents
Quand
une vie est interrompue aussi brutalement que celle que nous honorons et
célébrons aujourd’hui, on pourrait sans doute non sans raison, penser que cette
trajectoire brisée est un gâchis sans pareil. Certains pourraient ainsi croire
qu’il a manqué à notre valeureux compagnon de route, une portion appréciable de
ce bon sens élémentaire qui guide les vies simples, ces vies qui s’égrènent en
suivant le rythme prescrit par un conformisme de bon aloi, entièrement vouées a
l’assouvisemment de desseins privés, ceux qui confèrent leur honorabilité à tous
ceux qui s’astreignent à mener le genre d’existence que leurs familles, tout
comme les gens de raison et de traditions, souhaitent pour eux. Sous ce rapport, la vie
et la mort de Jacques Tiwa détonnent,
intriguent, et laissent sans voix. Mais il n’y a rien de mieux que la vérité du
cheminement de cet homme qui aura été de tous les bons combats, pour révéler
l’étendue de son extraordinaire dévouement pour son pays, pour comprendre
pourquoi il aura renoncé aux joies des ambitions personnelles, tout comme avant
lui, Ernest Ouandié, Ossendé Afana,
et beaucoup d’autres encore, connus ou anonymes, pour se mettre au service de
valeurs qui justifient le sacrifice ultime, aux yeux de cette intrépide fratrie
de patriotes et des personnes qui s’identifient à eux.
Camarade
Tiwa ! Tu as vécu jusqu’a cette
chute inattendue au champ d’honneur selon des codes, des convictions et des
valeurs que tu as choisi d’assumer jusqu’au bout, en toute liberté. Et pour
cela, tu mérites l’infini respect d’un pays qui n’a pas encore pris la mesure
de l’ampleur de l’offrande de liberté que ta vie sacrifiée lègue à la
postérité. Pour l’édification de tous et de chacun. Remember Ruben, tel est le
titre d’un livre poignant que Mongo Béti,
un autre grand combattant de la liberté a consacré à Ruben Um Nyobé, ce grand patriote que tu évoquais si souvent. Mais
aujourd’hui, il faudrait, on devrait dire « Remember Tiwa ! ». Et il faut le scander pour que les générations
à venir se souviennent, comme dit le poète, que le sang des martyrs féconde la
terre.
Ton
sang aura fait bien plus que simplement féconder la terre. Militant résolu du
parlement estudiantin, ce mouvement de lutte devenu le point de ralliement
d’une génération vouée aux causes justes, tu as su montrer le chemin aux
autres, les guider, indiquer par ton indomptable engagement politique, qu’on ne
lésine sur rien quand on lutte pour conquérir et affirmer une dignité si
souvent bafouée par les puissants du moment et leurs complices. Ton engagement
t’aura valu l’exil dans des pays lointains, des privations personnelles sans
nom, le regard éberlué de ceux qui ne comprenaient pas tes choix, moins encore tes
raisons d’exister selon tes principes.
De
retour au pays, tu as essayé de te consacrer aux tâches privées qui font les
existences supposées réussies. Dans cette dimension où chaque effort compte, une épouse complice est venue accompagner tes
jours et tes certitudes. En chemin, deux enfants sont arrivés, pour s’installer
dans une vie que si peu de gens pouvaient voir sous le jour extraordinaire d’une
destinée unique que l’Histoire réclamait pour servir de modèle héroïque à une
époque qui cherche encore ses repères.
Des
soldats à la solde de tortionnaires sont venus voler ta vie, armés d’une
quincaillerie de mort payée par tes impots, ton sang, et les efforts d’un pays
sous le joug de sordides satrapes jouisseurs et profiteurs. Ils ne savaient pas
qu’on ne tue pas la liberté ; tu es cette liberté qui sera toujours parmi
nous. Comme d’autres héros et martyrs avant toi, tu auras compris qu’une vie ne
vaut la peine d’être vécue si on ne peut pas se tenir debout, dans la droiture
d’une stature que rien ne corrompt, pour servir de phare rayonnant aux époques
tumultueuses.
A
peu de choses près, Ciceron, homme
de lettres, mais surtout homme d’Etat et de combat, a un jour dit qu’il valait
infiniment mieux donner au service de sa patrie, au service d’une cause juste,
une vie qu’on finit, tôt ou tard, par rendre à la nature. Tôt ou tard, la
nature reprendra toutes les vies. Mais elle ne peut rien pour altérer le
vibrant souvenir de ceux qui, comme toi, auront défié le temps, pour offrir
leur vie, simplement pour rendre le monde meilleur.
Un
Baobab se couchera aujourd’hui ici même à Bamougong,
cette partie de cette terre chérie qu’évoque un couplet de l’hymne national de
ce cameroun pour l’honneur duquel il est tombé. Mais les racines du majestueux
Baobab s’enfonceront dans cette terre de chez nous où nous le laissons
aujourd’hui, pour nourrir les vies qui viendront, pour semer les espérances à
venir.
Merci
pour tout, Jacques Tiwa. Nous ferons
le reste pour toi, pour tes enfants, ton épouse et ceux que tu laisses
derrière.
Nous sommes ici
dans une partie du cimetière des parlementaires. Ton repos y sera doux, sans
perturbations, dans l’absolue sérénité et la quiétude d’esprit qu’apporte le
sentiment du devoir accompli, bien, très bien accompli.
Au revoir Camarade
Combattant !
Vive Jacques Tiwa !
Bamougouong le 08 Mars 2008
Tes camarades et Compagnons de route